La chanson du jour : Les plages (par Jean-Louis Aubert - Album "Plâtre et ciment" 1987)
En plein coeur de l'été, n'est-ce pas un sujet d'actualité "les plages" ? Et même encore plus qu'il n'y parait hélas ...
Extrait du chat réalisé par "20 minutes" en mai 2014 ( clic ) :
Eva et Zoé: Nous sommes en classe de 3ème et nous préparons notre épreuve d'Histoire Des Arts. Nous avons choisi de parler d'une vos chansons : Les Plages. Nous souhaitons si cela est possible des explications sur cette chanson et ce que vous vouliez transmettre à vos fans. Nous serions très heureuses de recevoir une réponse de votre part afin de préparer au mieux notre épreuve !
Jean-Louis Aubert : La chanson a été écrite lors d’un échouage de notre voilier sur une plage de la Dominique. Cette île est très pauvre. Pourtant les enfants y sont très bien éduqués. Dans des écoles de culture anglaise. Cet endroit, pour le voyageur, ressemble à un paradis. Mais pour ceux qui y vivent, leur frustration est proche de l’enfer. Alors pendant la durée du séjour, un enfant de dix ans venait tous les jours en pirogue pour nous supplier de l’emmener en France. Il était prêt à tout pour cela. Même au pire. Un jour, je me suis assis près d’un vieil homme sur la plage et il m’a dit: “Je les regarde tous partir mais un jour ils reviendront, comme moi, après avoir fait le tour du monde, sur leur plage.” C’est tous ces moments qui m’ont inspiré la chanson.
Extrait d'une interview pour Paris Match le 8 avril 2008 (clic ) :
"Une chanson a toujours plusieurs sens, c’est jouissif. Pour la plupart des gens, “Les plages” parle du paradis. Mais pour moi, elle traite de l’immigration. “Un autre monde” est souvent comprise comme une chanson d’espérance, mais c’était un titre sur la maladie. “Voilà c’est fini” peut s’écouter comme un morceau sur la disparition. Mais en fait, il parle de trois ruptures amoureuses, mêlées dans le temps : ma première rupture, sur le quai du métro, avec une fille qui s’appelait Véronique. Et puis, c’est une chanson sur la rupture de Téléphone..."
Sur toutes les plages du monde
Sur toutes les plages y'a des mômes
Qui font signe aux bateaux
Sur toutes le plages de tous les coins
Y'a des mômes qui tendent la main
Aux navires de passage
Et si pour toi, là-bas c'est le paradis
Dis-toi que dans leur petite tête le paradis
C'est ici... hum c'est ici
Sur toutes les plages de toutes les mers
Sur toutes les plages y'a des mômes
Qui tournent le dos à leur mère
Sur toutes les plages, tous les pontons
Sur toutes les plages y'a des petits garçons
Qui fixent l'horizon l'horizon
Et si pour toi, là-bas c'est le paradis
Dis-toi que dans leur petite tête le paradis
C'est ici, oui, c'est ici
Qui veut les prendre à bord
Pourquoi pas eux d'abord ?
Ils sauront être forts
Et dans leur coeur pas de remords
Non, aucun remords
Et par un beau matin
Y'en a un plus malin
Ou y'en a un plus fou
Ou peut-être un plus beau
Qui prendra le bateau
Pour le je-ne-sais-où
Pour le soleil ou pour les sous
Dans tous les ports du monde
Dans tous les ports y'a des vieux qui débarquent
Et qui vont sur les plages s'asseoir près des vieilles barques
Et si pour eux, la vie c'était pas le paradis
Dis-toi que dans leur vieille tête le paradis maintenant
C'est ici, c'est ici
Sur toutes les plages y'a des vieux
Qui regardent les mômes
Tendre la main aux bateaux
Paroles et musique : Jean Louis Aubert (1987)
La version d'origine, en 1987, par Aubert'n'Ko :
La version Taratata de 1993 :
Et en version symphonique, avec l'orchestre du Festival "Un violon sur le sable" à Royan le 25juillet 2014 :
Plus de 20 ans après cette chanson, 4 août 2015 : l'OIM (Organisation Internationale pour les Migrations) informe que plus de 2 000 migrants ont perdu la vie en Méditerranée depuis le début de l'année :
(Dessin : Plantu clic )
(Dessin : Péji clic )
(Dessin : SK)
(Dessin : Ricardo pour El Mundo)
(Dessin : Ulys clic)
L'écrivain italien Erri De Luca a écrit une prière laïque aux migrants au moment du naufrage d'avril qui avait provoqué la mort de 800 personnes. En voici une traduction proposée sur le site Actua-Litté (clic)
Notre mer, toi qui n'es pas aux cieux
Et qui embrasses les rives de l'île
Et du monde, avec ton sel,
Que soit béni le fond de ton océan
Tu accueilles les navires bondés
Sans route sur tes ondes
Les marins pêcheurs sortis dans la nuit
Leurs filets parmi tes créatures
Qui reviennent au matin avec pour prise
Des naufragés sauvés.
Notre mer qui n'est pas aux cieux
A l'aube tu as la couleur du blé
Au coucher du soleil, celle du raisin et des vendanges
Nous t'avons semée de noyés plus
Que n'importe quelle époque de tempête.
Notre mer qui n'est pas aux cieux
Tu es plus droite que la terre ferme
Même quand tu soulèves des vagues hautes comme des murs
Puis les jettes au tapis.
Protège les vies, les voyageurs,
Comme des feuilles sur un boulevard,
Deviens pour eux un automne,
De caresses, d'embrassades, un baiser sur le front,
Aux mères, aux pères, avant de partir.
Erri de Luca - avril 2015 - La mia preghiera laica
Pour les personnes comprenant l'italien ou rien que pour le plaisir d'entendre Erri de luca prononcer ces mots :
(clic)